L’Afrique est la première région de production d’or au monde, mais une partie du métal extrait sort du continent par des circuits informels. Cet or de contrebande arrive essentiellement aux Emirats arabes unis, avant d’être réexporté notamment vers l’Europe.
Les Emirats arabes unis ont importé 748 tonnes d’or depuis les pays africains en 2024, soit une hausse de 18 % en glissement. Le continent représente ainsi plus de la moitié des importations totales d’or émiraties, qui ont atteint 1392 tonnes. C’est l’ONG helvétique SWISSAID qui a rapporté l’information le mardi 4 novembre, s’appuyant sur des données apparues brièvement sur la plateforme UN Comtrade.
Parmi les principaux exportateurs vers Dubaï, principale place émiratie de négoce de l’or, on retrouve le Togo (52 t), l’Ouganda (31 t) et le Rwanda (19 t). Or, aucun de ces pays ne dispose de mines industrielles ni d’une production artisanale suffisante pour justifier de tels volumes. Selon SWISSAID, ils servent surtout de plaques tournantes pour de l’or de contrebande provenant d’autres pays producteurs.
Le Rwanda et l’Ouganda abritent en effet plusieurs raffineries qui s’approvisionnent en RDC, d’après divers rapports. Le Togo, quasi dépourvu de production aurifère, profite quant à lui de sa proximité avec des producteurs ouest-africains comme le Burkina Faso et le Ghana.
Autre cas notable : le Soudan, en guerre civile depuis 2023, dont les Émirats ont importé 29 tonnes d’or à l’origine sujette à caution. En octobre 2025, The Sentry a établi un lien entre une partie de cet or soudanais et un réseau de sociétés liées à des hommes d’affaires proches des Forces de soutien rapide, groupe paramilitaire opposé à l’armée.
« Face à de tels chiffres, les Émirats arabes unis devraient à nouveau figurer sur la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI) », estime Marc Ummel, responsable du dossier matières premières chez SWISSAID, qui souligne que la législation émiratie sur l’approvisionnement responsable en or présente encore des lacunes.
Si le rôle central des Emirats arabes unis dans le négoce de l’or de contrebande exporté depuis plusieurs pays africains est suffisamment documenté, aucune solution n’a encore été trouvée sur le continent pour limiter l’ampleur du phénomène. Le rôle des clients des Emirats arabes unis peut donc s’avérer déterminant, notamment la Suisse, qui a importé 316 tonnes d’or depuis Dubaï en 2024. La question est de savoir quelles actions concertées peuvent être menées entre ces différents acteurs.
