Adjaratou Sanogo, l’amazone de l’agriculture hors-sol
De restauratrice à
spécialiste et formatrice en agriculture hors-sol, le parcours d’Adjaratou
Sawadogo/Sanogo est une histoire qui inspire plus d’un. Cette mère de trois
enfants, technicienne hydroponiste et présidente de l’Association de
l’agriculture hors-sol au Burkina, s’est lancée dans le domaine depuis deux
ans. Et aujourd’hui, elle est la preuve que l’agriculture hors-sol est très
rentable et peut contrer l’insécurité alimentaire. Portrait !
Si recommencer ou
repartir de zéro dans la vie d’un individu est souvent une décision difficile à
prendre, Adjaratou Sawadogo/Sanogo, elle, a osé le faire. Aujourd’hui, elle ne
regrette pas son choix. Au contraire, Mme Sawadogo - Adja pour les
intimes- est fière d’avoir pris ce risque. L’ancienne restauratrice est aujourd’hui
sollicitée partout au Burkina pour assurer des formations en agriculture
hors-sol.
Aujourd’hui, Adja
est sollicitée partout au Burkina Faso et suscite même l’admiration des
personnalités comme le « Gamdaogo » national en agriculture, le Larlé
Naaba Tigré, avec qui elle partage aussi sa passion dans le domaine.
Avec cette
battante, l’expression « Time is money » prend tout son sens. Lorsque
vous la rencontrerez, vous comprendrez. Avec son téléphone portable qui ne
cesse de sonner, il faut s’armer de patience pour échanger convenablement avec
elle. Toutefois, elle est toujours disposée à partager son savoir-faire.
De l’avis de ses
collaborateurs en passant par ses amis et sa famille, tous sont unanimes et
reconnaissent son courage et son dynamisme pour le travail bien fait. Pour eux,
Adja, comme ils l’appellent, est une femme battante et très dévouée pour les
choses qui lui tiennent à cœur et ne recule devant aucun danger quand il s’agit
de son travail. Certains mêmes parlent de « têtue », parce que quand
elle se fixe un objectif, quoique vous lui disiez, il faut qu’elle
l’expérimente elle-même avant de prendre sa décision. Coté social, Adjaratou
Sanogo est aussi reconnue pour son humanisme. Car, disent-ils, elle se définit
aussi par sa générosité envers les autres et elle le fait sans arrière-pensée.
Mais son seul défaut, c’est qu’elle est directe, elle ne tourne pas en rond
pour dire ce qu’elle pense.
En échangeant avec
cette femme qui se caractérise par son dynamisme, sa douceur et son sourire,
vous devenez aussi passionné de l’agriculture hors-sol. Car parler de ce
domaine, c’est réveiller beaucoup d’émotions en elle, surtout quand elle se
retrouve devant ses serres en constatant l’évolution de ses plantes.
Entre Adja et les
plantes, c’est une histoire d’amour qui dure depuis sa tendre enfance.
« Depuis toute petite, j’aimais voir les plantes pousser. Quand je
plantais quelque chose, j’étais pressée de voir la plante grandir (…). Quand je
touchais les plantes, ça développait quelque chose en moi et je me sentais
bien. C’est ma passion mais je ne me suis pas directement engagée dans le
domaine ; j’ai pris une autre route dans la restauration mais cette route
m’a ramenée encore dans ma passion. Et comme j’avais l’habitude de fréquenter
les marchés pour faire mes achats, j’ai remarqué qu’il y avait des ruptures de
certains produits pendant certaines périodes de l’année, c’est de là que je me
suis dit, pourquoi ne pas trouver un moyen de produire toute l’année ?
C’est de là que c’est parti », retrace Adjaratou Sawadogo.
Partir du bas de l’échelle
En deux ans dans le
domaine, elle se frotte déjà les mains. « J’ai commencé petit à petit, je
n’avais même pas plus de 100 000 F CFA. Mais aujourd’hui, ça va bien et je ne
vais pas le cacher », témoigne-t-elle. Son conseil pour ceux qui veulent
entreprendre, peu importe le domaine, c’est d’accepter de commencer « tout
petit », commencer par le « bas de l’échelle » et la qualité de
votre travail parlera à votre place et vous ouvrira les portes des
opportunités. « Voir grand, c’est bien, mais c’est l’objectif visé que
vous devez atteindre », enseigne celle qui est également formatrice en
entrepreneuriat agricole.
En écoutant son
histoire vous croirez que tout est facile. Pourtant ça ne l’est pas, parce que,
selon ses dires, il a fallu un travail acharné et un investissement pour se faire
former avant d’atteindre cette étape. Elle le conseille d’ailleurs à tous ceux
qui veulent entreprendre dans n’importe quel domaine. A leur l’intention elle a
aussi laissé entendre qu’il faut toujours s’attendre à rencontrer des
difficultés, parce qu’il y en aura sur le chemin. Mais l’essentiel, c’est de
pouvoir les surmonter afin d’atteindre l’objectif visé.
Une solution pour l’autosuffisance alimentaire
Définie comme toute
culture que l’on fait en dehors du sol, l’agriculture hors-sol est un moyen de produire
n’importe quel produit agricole sans un contact avec le sol. Pour la
spécialiste, c’est un type de culture où la plante finit tout son cycle normal
sans un contact avec le sol, parce qu’il est remplacé par des substrats. Ces
substrats sont notamment les fibres de coco, les billes d’argile, les coques
d’arachide et du gravier. Avec l’agriculture hors-sol, on peut produire de la
tomate, du haricot vert, de l’oignon, des fruits, etc., et la rentabilité est
double. Ça vous donne quatre fois plus que l’agriculture conventionnelle,
explique-t-elle. « C’est ce type de culture qu’il faut au Burkina Faso,
parce que ça se pratique partout. Même chez vous à la maison, il suffit
seulement d’aménager un petit espace. Notre climat est adapté, c’est un domaine
promoteur et c’est vraiment rentable. Si chacun arrive à se nourrir
convenablement sans trop de difficultés, on pourra alors parler
d’autosuffisance alimentaire », pense Adjaratou Sanogo.
De grands objectifs
Devenue l’une des
spécialistes de l’agriculture hors-sol au Burkina, Adjaratou Sanogo rêve grand
pour son pays. Son souhait, c’est que les Burkinabè comprennent que c’est la
solution pour produire en toute période et éviter les pénuries. Car,
précise-t-elle, si la demande nationale est satisfaite, les populations ne
seront plus dans l’insécurité alimentaire. « On a l’eau, un climat
favorable et un coût réduit pour la production. Mon souhait, c’est que les
Burkinabè retournent vers ce type de culture, qu’on arrive à l’adopter.
Ensuite, j’aimerais aussi que ma lutte soit entendue partout dans le monde,
surtout en Afrique. Que les gens adoptent l’agriculture hors-sol, parce que je
trouve que c’est la solution », espère l’avisée en la matière. « Moi,
je dis que les Burkinabè doivent nourrir les Burkinabè. Cela ne peut se faire
qu’à travers l’agriculture hors-sol. Cela permettra de sortir l’Afrique de sa
pauvreté et d’aller à la conquête du monde, parce que c’est ce que nous aussi,
nous pouvons apporter à l’humanité », lance-t-elle.
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