Les énergies renouvelables dominent désormais les investissements non cotés, mais des efforts supplémentaires sont requis pour surmonter les barrières financières et structurelles. D’après les analystes, il est essentiel de renforcer les cadres réglementaires, de favoriser les partenariats public-privé et de développer les compétences locales afin de soutenir l’essor du secteur.
En 2023, les énergies renouvelables ont attiré 37% des investissements non cotés en Afrique, une première pour ce secteur qui dépasse les services financiers, longtemps dominants, d’après le dernier rapport de la banque européenne d’investissement (BEI), publié le jeudi 7 novembre dernier. Ce basculement confirme un tournant : les capitaux se détournent des énergies fossiles, dont la part des investissements n’atteint plus que 4% au profit de solutions plus durables. Cette dynamique traduit une prise de conscience croissante et une préférence des investisseurs pour des actifs verts, jugés stratégiques dans un continent en quête de résilience face aux défis climatiques.
Le renversement de tendance s’inscrit dans un contexte global de quête d’alternatives durables et économiques. Alors que les pays africains restent particulièrement vulnérables aux effets du changement climatique, le développement des infrastructures vertes y est perçu non seulement comme une nécessité écologique, mais aussi comme une opportunité stratégique pour l’économie régionale. En témoignent les perspectives des banques africaines : 67% des établissements interrogés considèrent la transition climatique comme un levier d’opportunité, et 79% ont défini des objectifs spécifiques en matière de climat. Si ce positionnement laisse entrevoir un potentiel d’engagement croissant dans les énergies renouvelables, il cache aussi certaines lacunes.
Pour l’heure, nombre d’institutions financières n’intègrent pas pleinement le risque climatique dans leurs activités, particulièrement dans les secteurs les plus exposés, tels que l’agriculture, qui restent faiblement financés par les banques. Conséquence : l’Afrique reste encore loin de ses ambitions écologiques : les financements climatiques actuels ne couvrent que 12% des besoins annuels, laissant un déficit considérable pour bâtir les infrastructures vertes nécessaires. De plus, la transition repose pour l’instant quasi exclusivement sur des fonds publics (90%) et internationaux (99%), tandis que le secteur privé reste largement en retrait.
Globalement sur le continent, alors que les investissements totaux non cotés ont connu une baisse de 24% entre 2022 et 2023, passant de 6,5 milliards à 5 milliards de dollars, les services financiers, autrefois en tête avec 37% des investissements en 2022, ont suivi la même tendance en chutant à 10% rien qu’en 2023. Les autres secteurs — les biens de consommation, l’industrie et les technologies de l’information — ont maintenu des parts d’investissements relativement stables, entre 10% et 13%, tandis que l’agroalimentaire a vu sa part tripler, passant de 1% à 8%.
Concentration des flux en Afrique du Sud et au Kenya
L’Afrique du Sud domine les flux d’investissements non cotés, avec près de 47% des capitaux attirés en 2023. Le Kenya et la Côte d’Ivoire suivent, avec respectivement 11% et 7% des investissements, soutenus par leur dynamisme et leur potentiel dans le secteur des infrastructures vertes. Le Nigeria, autrefois au sommet des destinations d’investissements, a vu sa part se réduire à 6%, conséquence d’une baisse d’engouement pour la fintech, un secteur devenu moins prioritaire, l’année dernière.
Réduction des coûts grâce aux appels d’offres
L’attrait pour les énergies renouvelables en Afrique repose également sur des appels d’offres compétitifs, qui ont permis de faire baisser les coûts de production dans certains pays. En Zambie et au Sénégal, les projets solaires ont atteint des tarifs parmi les plus bas au monde, rendant l’énergie verte accessible à des tarifs avantageux pour les populations locales. Pour les gouvernements, ces projets offrent une alternative pour répondre aux besoins énergétiques tout en limitant la dépendance aux combustibles importés et en stabilisant les finances publiques.