La semaine dernière, Per Magnus Nysveen, associé principal et directeur de l’analyse chez Rystad Energy, a déclaré que l’Afrique serait le continent où se concentreront la plupart des nouvelles découvertes de pétrole et de gaz dans les trente prochaines années.
Avec plus de 125 milliards de barils encore inexploités, soit 7,2 % des réserves mondiales d’hydrocarbures, l’Afrique recèle un potentiel immense. Cependant, malgré cette abondance et les efforts pour renouveler durablement sa production, l’Afrique reste l’une des régions les moins dynamiques au monde dans l’amont pétrogazier, arrivant en dernière position au classement des machines de forage en activité, selon des données de Statista d’août dernier.
Cette situation persistante met en évidence la nécessité pour l’Afrique de renforcer son attractivité en matière d’investissements pétroliers. Les faits montrent que la région ne dispose pas encore des conditions nécessaires pour attirer massivement les investissements internationaux. Les cycles d’octroi de licences, essentiels pour encourager les sociétés d’exploration et de production, ainsi que les majors, à s’installer durablement, restent encore trop rares. Cette inertie limite l’exploitation des ressources stratégiques et freine l’arrivée de nouveaux projets.
Pourtant, cette prévision de Rystad Energy pourrait devenir un avantage stratégique dans un contexte de demande énergétique mondiale croissante. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), si la politique énergétique mondiale actuelle demeure inchangée, la demande de pétrole pourrait dépasser les 100 millions de barils par jour d’ici 2050.
Le Nigeria, premier producteur de pétrole en Afrique, tente de changer la donne. Au deuxième trimestre, il a lancé un nouvel appel d’offres pour 12 blocs, son premier cycle d’octroi de licences depuis 2007, afin de monétiser ses 209 trillions de pieds cubes (tcf) de gaz naturel non exploités, qui pourraient résoudre ses défis énergétiques internes et positionner le pays comme un acteur clé du marché international du gaz naturel. Le mois dernier, un cadre juridique a également été introduit au Parlement pour attirer des investissements dans le secteur gazier en eaux profondes, visant un afflux de 5 à 10 milliards de dollars à court terme.
Certains pays, comme l’Égypte, se démarquent déjà par une politique proactive en matière d’appels d’offres. Récemment, la société publique du gaz naturel (EGAS) a lancé un cycle pour 12 périmètres d’exploration afin d’attirer des entreprises pétrolières internationales dans ses bassins onshore et offshore. À l’inverse, des pays comme l’Angola et le Mozambique, bien que dotés d’un potentiel énergétique élevé, peinent à offrir des environnements stables et des régimes fiscaux compétitifs, ce qui freine leur attractivité, selon les analyses de Rystad Energy.
Les pressions liées aux exigences climatiques, qui affectent les investissements dans les bassins pétroliers matures, comme la mer du Nord où la transition énergétique a rendu les projets de plus en plus coûteux, pourraient jouer en faveur de l’Afrique. La région, qui prône la justice énergétique, insiste sur l’importance de ne pas imposer les mêmes exigences climatiques aux économies émergentes qu’aux pays développés. Toutefois, les législateurs africains devront établir une stabilité réglementaire et renforcer les infrastructures pour attirer les investisseurs.
La question demeure donc : les gouvernements africains sauront-ils s’adapter rapidement pour transformer ce potentiel en succès tangible ? Faute de mesures pour multiplier les cycles de licences et bâtir les infrastructures locales, l’Afrique pourrait laisser échapper cette opportunité historique de devenir le prochain hub pétrolier du monde. Alors que d’autres économies émergentes se positionnent pour attirer les investisseurs, le continent ne peut se permettre de rester passif. Pour maximiser ses chances de devenir un acteur pétrolier mondial incontournable, le continent doit se doter d’une vision stratégique claire et de politiques énergétiques ambitieuses.