En dépit de son immense potentiel naturel, le tourisme en RDC reste l’un des secteurs les moins exploités de l’économie. Conscient de cette lacune, le gouvernement ambitionne désormais de faire du tourisme un levier essentiel pour la diversification économique.
Le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) a approuvé, lors du Conseil des ministres du vendredi 20 septembre, deux projets phares présentés par le ministère du Tourisme dans le but de dynamiser le secteur. Parmi ces projets, la signature d’un partenariat « mutuellement avantageux » avec le club de football italien, AC Milan. Selon le ministre du Tourisme, Didier M’Pambia Musanga, c’est une initiative centrale pour promouvoir la destination RDC à l’international.
Le projet consiste à utiliser la portée mondiale du club italien pour promouvoir la RDC en tant que destination touristique de choix. Concrètement, cela implique une campagne internationale de communication et de marketing où l’image de la RDC sera associée à celle de l’AC Milan. Le club, l’un des plus suivis et populaires dans le monde, servira de vecteur pour accroître la visibilité du pays auprès d’un public international, en particulier les fans de football et les voyageurs potentiels. La RDC espère ainsi capitaliser sur la notoriété de l’AC Milan pour attirer des touristes intéressés par la nature, la culture, les safaris, etc., conformément à sa politique nationale du tourisme.
La validation du projet par le Conseil des ministres fait suite à un protocole d’accord signé en juillet 2024, lors d’une visite officielle de M’Pambia Musanga, en Italie. A cette occasion, des discussions avec les dirigeants du club ont permis de définir les contours chiffrés de ce partenariat. Pour l’instant, aucun détail n’a été divulgué.
Le choix de l’AC Milan n’est pas anodin. Le club jouit d’une renommée mondiale, avec près de 500 millions de supporters dans le monde et une présence médiatique forte dans de nombreux marchés stratégiques pour le tourisme, notamment en Europe, en Asie et en Amérique. D’ailleurs, outre-Atlantique, le club a enregistré l’année dernière une croissance de 50 % de sa fanbase, selon une étude de YouGov et Men in Blazer.
Objectifs visés
Le gouvernement congolais mise sur plusieurs retombées concrètes. Premièrement, une augmentation significative du nombre de touristes, ce qui pourrait générer des revenus substantiels pour l’économie nationale. Il faut savoir que dans sa politique nationale du tourisme, la RDC envisage de générer des recettes annuelles en devise de 7 milliards de dollars à l’échéance 2030 et de créer entre 200 000 et 500 000 emplois dans le secteur à cette échéance.
Malgré ces ambitions, la contribution actuelle du secteur touristique au PIB national demeure fixe depuis plusieurs années à environ 5 %, une situation que le gouvernement espère changer grâce à ces nouvelles initiatives et à l’attrait de partenariats internationaux.
Deuxièmement, ce partenariat pourrait améliorer l’image internationale de la RDC, souvent perçue à travers le prisme de l’instabilité politique et des conflits. En s’associant à une marque aussi prestigieuse que l’AC Milan, la RDC espère attirer un regard neuf et positif sur ses attraits touristiques, tels que ses parcs nationaux et ses paysages naturels riches. De plus, ce projet est une manière pour le gouvernement de renforcer la collaboration internationale, d’attirer des investisseurs dans d’autres secteurs et de diversifier l’économie, fortement dépendante de la manne minière.
Le Conseil des ministres a également validé un projet complémentaire visant à créer des villages touristiques. Ce concept a pour objectif de développer le tourisme en renforçant la connectivité entre les zones urbaines et rurales tout en valorisant les cultures locales. Selon Didier M’Pambia, ces villages touristiques contribueront non seulement à préserver les traditions locales, mais aussi à générer des emplois durables et à promouvoir l’entrepreneuriat au sein des communautés rurales.
Une opportunité pour miser sur l’écotourisme ?
Début septembre, la RDC a validé sa politique nationale du tourisme. Le document contient quatre objectifs clés à atteindre d’ici 2030 : le développement de la coopération et des partenariats, la promotion du tourisme durable, la diversification de l’offre touristique et le renforcement des capacités institutionnelles. Ce plan cadre avec les recommandations des experts de la Banque africaine de développement (BAD), qui, dans leur rapport-pays 2023 sur la RDC, ont souligné l’importance de promouvoir l’écotourisme comme un vecteur clé pour tirer parti du riche capital naturel du pays. Ils y évoquent un vaste potentiel, notamment grâce aux tourbières, aux mangroves, aux ressources en eaux douces, et à la position géographique au centre de l’Afrique.
De plus, avec des sites comme le Parc des Virunga, la RDC dispose d’un potentiel immense pour attirer des touristes en quête d’expériences uniques et durables. Les célébrations à venir, notamment le centenaire du Parc des Virunga en 2025, constituent une opportunité en or pour mettre en avant la richesse naturelle du pays et renforcer sa position sur le marché du tourisme écologique, selon les spécialistes.
Dans ce contexte, la comparaison avec d’autres pays africains est révélatrice du potentiel encore sous-exploité en matière d’écotourisme. En Tanzanie, avec des sites emblématiques comme le Serengeti et le Kilimandjaro, le tourisme représente près de 10 % du PIB. Entre 2000 et 2012, les arrivées touristiques ont doublé, faisant du secteur la principale source de recettes d’exportation du pays. De son côté, la Namibie tire environ 19 % de son emploi total (direct et indirect) du tourisme centré sur la nature, soulignant ainsi l’importance cruciale de ce secteur pour son économie. Enfin, aux Maldives, le tourisme constitue le principal contributeur au budget de l’Etat, permettant au gouvernement d’investir dans des secteurs clés comme la santé et l’éducation.
Ces exemples illustrent comment un secteur touristique bien développé peut être un levier majeur pour la croissance économique et la diversification des revenus nationaux. La RDC, avec son riche patrimoine naturel, aspire à atteindre des résultats similaires à travers sa nouvelle politique du tourisme.
Lors de la clôture du forum de validation de la politique nationale du tourisme début septembre, Jean-Pierre Lihau, vice-Premier ministre chargé de la Fonction publique, a rappelé que « le tourisme pourrait non seulement générer des emplois stables et durables, mais aussi devenir un levier essentiel pour la préservation de la biodiversité, la valorisation des écosystèmes, et l’amélioration des conditions de vie des populations locales ».